Ce jeudi 25 mars, l’ONG Foodwatch a explicité les fraudes alimentaires, décryptage à l’appui, dans un livre d’Ingrid Kragl (directrice de l’information) intitulé Manger du faux pour du vrai – Les scandales de la fraude alimentaire. Pour mettre un terme à ces fraudes et négligences qui augmentent les risques sanitaires, plusieurs entreprises et notamment la start-up suisse Farmer Connect ont proclamé le développement d’une solution efficace à l’aide de la technologie blockchain afin de retracer les origines des différents produits.
La technologie innovante de la blockchain au service de la transparence et de la traçabilité
Une blockchain est une base de données alimentée par les utilisateurs dans laquelle les transactions sont enregistrées et partagées entre ces derniers. Les informations entrées ne peuvent être transformées ou supprimées, car la sécurité est assurée par des techniques de cryptographie numérique avancées et chacun des blocs de la chaîne contient l’historique des transactions réalisées précédemment.
Cette technologie permet de façon immédiate et à un coût moindre une traçabilité dans des environnements où le nombre d’acteurs est très élevé. Grâce à cette nouveauté, les différents acteurs ont pour contrainte de respecter les règles mises en place et d’honorer les protocoles et dispositifs établis.
L’obligation de traçage des produits agroalimentaires en Europe
La traçabilité des produits est aujourd’hui une obligation dans l’industrie alimentaire. De la production à la distribution auprès des consommateurs, les acteurs doivent impérativement étiqueter le produit proposé selon ses caractéristiques et son origine. Pour ce faire, ils utilisent de plus en plus des objets connectés ou encore des applications comme My Food Story. Ce soft de traçabilité made in France permet ainsi aux acheteurs potentiels d’accéder à l’ensemble des étapes de production d’un produit en scannant ce dernier avec leur smartphone.
Les défaillances de système au sein de l’industrie agro-alimentaire
La production des produits alimentaires est un système à grande échelle dont les acteurs sont nombreux : agriculteurs, producteurs, fournisseurs, consommateurs… Dans un environnement aussi vaste, la transparence des informations entre ces différents « partenaires » n’est pas toujours assurée. Malheureusement, ce manque de transparence facilite les fraudes et les agissements contraires aux normes de santé et de production.
L’affaire Findus datant de février 2013 en est l’une des illustrations les plus frappantes. En effet, ce scandale a fait le tour des médias lorsque l’on a découvert de la viande de cheval dans des produits censés contenir uniquement de la viande de bœuf. L’entreprise Spanghero et d’autres intermédiaires impliqués auraient privilégié la viande de cheval à la viande bovine qui était plus chère et modifié l’étiquetage des lots de viandes afin d’augmenter leurs bénéfices sur la marchandise.
Ces marges de manœuvre avaient à l’époque semé le doute sur la fiabilité des conditions de production alimentaire, d’autant plus que cette affaire n’a pas été la seule au cours de ces dernières années (contamination d’œufs au fipronil, contamination par la salmonelle de produits laitiers…) et qu’environ 1 personne sur 10 tombe malade après avoir ingéré des aliments infectés.
On estime que sur le marché agroalimentaire, moins de 10 % des produits en circulation sont tracés, examinés et certifiés. Cette faible proportion met en évidence notre vulnérabilité en tant que consommateurs et peut nous amener à poser la question suivante : savons-nous vraiment ce qu’il y a dans nos assiettes ?
IBM Food Trust : des produits sécurisés
Depuis plusieurs années, notamment après les drames sanitaires, s’est lancé un vaste mouvement en faveur de la protection des consommateurs vis-à-vis des risques de santé liés la production, à la conservation et à l’acheminement des produits alimentaires.
IBM Food Trust, plateforme basée sur la blockchain, est un réseau collaboratif créé en 2016 pour transmettre aux producteurs, fournisseurs, distributeurs et industriels des informations sur leur écosystème. Son but ? Leur permettre de partager avec les consommateurs la totalité des données en lien avec la sécurité du produit.
En prenant l’exemple de Carrefour, qui est non seulement l’un des adhérents du réseau, mais aussi l’un des collaborateurs ayant travaillé au développement et à l’essor du dispositif IBM Food Trust, on peut distinctement percevoir la qualité du processus.
Farmer Connect : la blockchain comme trait d’union entre petits producteurs et consommateurs
Plusieurs groupes commerciaux ont accordé leur confiance à la logistique IBM Trust Food, et notamment la start-up suisse Farmer Connect. L’entreprise souhaite garantir la traçabilité des produits tels que le cacao, le thé, les épices et le café tout en facilitant le relationnel entre consommateurs et producteurs. Une levée de fonds en série A par Itochu Corporation (société japonaise fournisseuse de matières premières aux fabricants et aux détaillants) d’une valeur de 9 millions de dollars a été capitale pour que l’entreprise puisse développer son logiciel Farmer Connect et son application web Thank My Farmer. Des investisseurs d’Amérique, d’Europe, mais aussi le partenaire fondateur de l’entreprise, Sucafina, ont grandement contribué au bon déroulement du projet.
La production de cacao et de café est un milieu fortement opaque, à cause de la multitude d’agriculteurs. La solution proposée par la start-up suisse combine l’application web et le logiciel qui permettent aux particuliers de retrouver l’origine des produits et par la même occasion soutenir financièrement les agriculteurs locaux grâce à des programmes de dons. La fiabilité du traçage et la transparence offerte par ces différentes technologies basées sur la blockchain ont permis l’expansion de ces dernières. De plus en plus d’entreprises convoitent cette technologie, à l’instar d’un des leaders mondiaux de l’industrie du café : Massimo Zanetti Beverage Group.
Avec sa nouvelle gamme de café durable Segafredo Soria, la firme entend franchir un cap en matière de transparence et de traçabilité des produits à l’aide de la technologie blockchain. En 2020, 44 % des clients déclaraient utile le fait de disposer de plus d’informations sur les producteurs, tandis que 92 % des consommateurs italiens ressentaient le besoin de connaitre l’origine des produits sur le marché (source : IBM & Morning Consult Europe). Le groupe est entré en contact avec Farmer Connect afin de concrétiser ce projet et pouvoir commencer la commercialisation de cette gamme dans le monde entier au début de l’année 2022.
Au-delà d’assurer la sécurité des produits grâce à la technologie blockchain, le groupe italien a su répondre à un besoin client et donc s’assurer la confiance et la fidélité des consommateurs.